Panorama 2Le Havre, 500 ans… et même plus !

Où l’on découvre comment énerver son beau-père.

1905. Au Salon des indépendants à Paris, le collectionneur Ernest Siegfried déambule dans les salles en quête de nouvelles œuvres d’art à acheter. Pourtant, ce salon expose des tableaux modernes que Siegfried a justement en horreur… S’est-il égaré ?

Le Grand Palais, où se trouvait le Salon des Indépendants, entre 1895 et 1905,

début du 20e siècle, carte postale, Bibliothèque du Congrès, Washington

Au contraire : il compte acquérir les toiles les plus "loufoques et les plus laides" du Salon pour les offrir à son gendre ! Ce dernier est Olivier Senn, négociant en coton au Havre et grand mécène de l’art moderne. Ses goûts novateurs en matière de peinture agacent son beau-père qui tient à lui prouver qu’il a tort de dépenser de l’argent ainsi.

Alors quand Siegfried passe devant la salle où sont exposés les tableaux de Vlaminck et Derain, il s’y engouffre. Les peintures "fauves", aux couleurs violentes et aux formes simplifiées ne ressemblent à rien de réel. Ces laideurs cloueront le bec de son gendre !

André Derain, Bougival,

vers 1904, huile sur toile, 41,5 x 33,5 cm, Collection Olivier Senn. Donation Hélène Senn-Foulds, 2004, MuMa – musée d’art moderne André Malraux / Photo : 2013 MuMa Le Havre / David Fogel, ADAGP, Paris 2018

Siegfried achète trois Derain sur les huit exposées, dont Le Vieil Arbre et Bougival. Très content de son coup, il déchante vite lorsqu’il présente les tableaux à son gendre. Ce dernier les adore ! Et plus particulièrement Bougival, une vue du village du même nom, la plus "fauve" des trois toiles : un véritable feu d’artifice.


Le tableau reste dans la famille jusqu’en 2004, lorsque les descendants le donnent au musée d’art moderne André-Malraux du Havre…

Le MuMa au Havre,

Photo : Alexandre Rety - LHENT

Offert à Olivier Senn pour se moquer de lui, le tableau Bougival est aujourd’hui l’un des chefs-d’œuvre du MuMa.